Je me souviens du concert au Rockstore.
La foule se bouscule, petits pas sautillants, des rires, des cris, des corps en sueur, et là je me dis, putain on dirait les concerts auxquels mon père assistait, et que j’enviais.
L’air saturé, les stroboscopes vifs, les guitares qui donnent l’impression de vibrer sous la peau. Ce qui m’a frappé, c’est la présence du public. Presque aucun téléphone, beaucoup de visages jeunes comme le mien, mais habités par un imaginaire plus vieux que nous. Je ressentais cette impression de « temps suspendu », ce moment où la salle se resserre et où la musique fabrique quelque chose qui ressemble à de la mémoire… alors que nous n’avons rien à nous rappeler.
Ce groupe, Avalonbloom, que j’ai découvert au lycée, et que je suis de manière rigoureuse, me touche par cet esthétique nostalgique. Leurs clips sont filmés à la VHS et les shoots à l’argentique. Moi, je n’ai jamais vraiment connu l’ère analogique, mais quand je vois ces images, j’ai l’impression d’entrevoir un monde plus granuleux, moins lisse. Eux ne cherchent pas à imiter le passé, ils cherchent à lui redonner une texture, une couleur. Et je crois que c’est pour ça qu’on se projette autant. Ils nous offrent une version du rock débarrassée des dérives, une dimension romantique plus saine, mais tout aussi vibrante.
Quand je les regarde sur scène, je sens bien que je ne suis pas nostalgique « de quelque chose ». Je suis nostalgique d’un imaginaire collectif, nourri par des films, des pochettes d’albums, des vidéos mal compressées sur YouTube. Avalonbloom transforme cette nostalgie fantôme en expérience réelle. Ils ne jouent pas seulement leurs morceaux, ils nous donnent l’impression d’être au début de quelque chose, peut-être même d’une scène montpelliéraine qui se réveille.
J’ai vingt ans, et pourtant, en les voyant, j’ai la sensation d’approcher une sorte d’origine du rock, recomposée, rêvée, mais sincère. Ce n’est pas la mémoire d’hier, mais la possibilité d’une aventure défoulante au temps présent.
